Lucie Gomes

Recherches

, 00:46am

  • ANR CCEH - 2021-2025 : Compétences critiques et enseignement de l’histoire

 « Le contexte politique et social rend plus nécessaire que jamais le développement des capacités critiques des citoyen-nes envers la masse des documents qui se diffusent désormais très rapidement par les médias et réseaux sociaux. La plupart des études disponibles postulent l’existence d’un « esprit critique » général et s’intéressent peu au fonctionnement essentiellement disciplinaire de l’École. Le projet CCEH a pour objectif de pallier ce manque pour l’enseignement scolaire de l’histoire en interrogeant les conditions d’apprentissage et de transfert des compétences critiques historiennes à des situations non disciplinaires (actualité médiatique). Il croise quatre cadres théoriques centraux du champ de la didactique de l’histoire (Cren : problématisation, Cread : Théorie de l’action conjointe en didactique, Hep Vaud : rapports mémoire/histoire et U. de Montréal et U du Québec en Outaouais : pensée historienne), dans trois contextes nationaux (France, Suisse, Canada) sur des corpus de situations expérimentales en milieu scolaire. Une méthodologie qualitative de comparaison continue (inscrite dans la Grounded Theory de Glaser et Strauss) produira des concepts pour (1) mieux penser les conditions du développement des capacités critiques disciplinaires et leur transfert, (2) développer des outils pour la formation des enseignant-es et (3) documenter de possibles évolutions curriculaires.

Trois hypothèses structureront la recherche. 1. Les compétences de critique documentaire développées en histoire scolaire ne se transfèrent pas de facto en compétences générales parce qu’elles ne concernent que la connaissance du passé par l’étude de ses traces ; 2. Les compétences critiques historiques ne se réduisent pas à appliquer des règles (notamment de critique externe et interne des documents), elles consistent en une évaluation des situations du passé par référence à des modèles d’enquêtes disciplinaires ; 3. Les enseignant-es doivent donc elles-eux-mêmes dépasser le modèle pédagogique « enseignement de règles + entrainements à les appliquer ». Pour cela elles-ils ont besoin de connaissances sur comment apprendre aux élèves à imiter des modèles d’enquêtes.

La méthodologie prévoit la co-conception et la réalisation, avec des enseignant-es, de trois séries de trois séquences d’enseignement dans les quatre pôles (correspondant aux quatre cadres théoriques des membres du consortium). Ces quatre corpus seront structurés par une approche commune issue des coopérations antérieures déjà riches des membres du consortium, qui permettra une comparaison autour de trois variables partagées (enquête, contenus, analogie). Le processus comparatiste est double : entre les données produites dans les quatre pôles, et entre les séquences et séries de séquences tout le long de la durée du projet.

Sur un plan pratique, chaque pôle élaborera localement une première série de séquences par un travail de coopération entre chercheur-es et enseignant-es, les premier-ières ayant la responsabilité des objectifs scientifiques, les second-es des objectifs pédagogiques. Les données enregistrées (séances de préparation et mises en oeuvre en classe) seront transcrites. Dans le semestre suivant, chaque pôle procèdera à une première analyse des données dans son cadre théorique, pour préparer le travail collectif comparatiste qui réunira l’ensemble des membres du consortium à l’occasion d’une rencontre de trois jours. Cette étape aboutira à identifier les premières catégories conceptuelles pertinentes autour des trois hypothèses et des trois variables communes, et à dégager des modifications pour élaborer la série de séquences suivante (l’échantillonnage théorique, selon la Constant Comparative Method of Qualitatve Analysis), organisée selon le même schéma l’année suivante. La troisième et dernière série permettra en outre la production, par le pôle nantais, d’un support vidéo destiné à la formation des enseignant-es. »

https://cceh.hypotheses.org/144

  • Oradour-sur-Glane - 2021-2024 : Enquêtes problématisées sur les narratifs mémoriels

En cours d’histoire, les élèves peuvent apprendre à développer des compétences critiques, référées à l’épistémologie historienne. Enquêter sur les narratifs, c’est construire des savoirs apodictiques. Le Cadre de l’apprentissage par problématisation nous permet de produire des données didactiques pour ensuite les analyser. Cinq séquences forcées sont menées avec des élèves se rendant en visite scolaire au village d’Oradour-sur-Glane, massacré et détruit en 1944.  Les narratifs interrogés sont mémoriels (le cas d’une rumeur sur le massacre), muséaux (travail de muséohistoire) et politiques (études de discours).        

Les élèves explorent les possibles par la mise en tension entre leurs premières idées explicatives et les données du problème (leurs connaissances, la visite, les documents). Ils produisent ainsi des idées explicatives améliorées par le processus de problématisation. Notre programme de recherche s’appuie sur les résultats de ces séquences forcées. Faire de l’histoire en classe passe par le questionnement systématique des narratifs, qui nécessite de quitter le sens commun pour entrer dans un registre épistémologique historien.

  • Recherche Enseignement de l’histoire et Terrorisme (début en 2024)

Le terrorisme est un concept utilisé en histoire pour étudier de nombreux événements. Dans la perspective de l’ouverture du Musée mémorial du terrorisme en 2027, je débute une série d’expérimentation en classe pour comprendre comment les narratifs autour du terrorisme peuvent être compris des élèves : ce que les terroristes disent, ce qui est dit d’eux, les qualifications discutables de terrorisme (écoterrorisme). L’enjeu est de poursuivre mes réflexions sur le narratif comme entrée épistémologique dans l’enseignement de l’histoire afin de développer les compétences critiques des élèves.

  • Recherche sur les pratiques historiennes (début en 2025)

Sur initiative de Gérard Sensevy et du CREAD, avec Nadine Fink et Sylvain Doussot, je m’intéresse à l’élucidation des pratiques historiennes pour mieux les documenter. Il s'agit de mener un travail de description de la pratique de la recherche en histoire, c'est-à-dire de documenter ce qui est en général tacite dans le travail de recherche, les crafts and skills des historiens pour réguler leur activité de recherche considérée dans sa spécificité épistémologique. De ce point de vue, l'enjeu est de produire des connaissances sur l'activité réelle, mais très peu accessible, du travail d'enquête en histoire, en partant non pas de généralités épistémologiques, mais de leur activité propre.